AV 98 Sommet, mob de luxe !


Par Ludovic MURA


VERS DES SOMMETS DE PRODUCTION


Pour Motobécane, 1962 est une année clé ; dès le mois d’août, la nouvelle usine de St-Quentin (Aisne) est mise en service. La volonté de Charles BENOIT, fabriquer 3000 cyclomoteurs par jours, soit, doubler la production par rapport à 1960 où déjà, 40800 machines étaient sorties des chaînes de montage.


Parallèlement à cet objectif, la marque continue sa politique de diversification en s’appuyant sur un outillage puissant et un bureau d’étude dont la capacité d’innovation n’est plus à démontrer. C’est dans ce contexte, que treize ans après la timide présentation de l’AV3, la nouvelle AV98 Sommet est dévoilée sans complexes au Salon 1962.


MOBYLETTE VERSION GRAND LUXE : Ce qui frappe au premier coup d’œil, c’est la réussite esthétique. Bien qu’élaborée sur la base de la coque en tôle emboutie de l’AV89, l’AV98 ne dégage aucune impression de lourdeur. Certes, on n’atteint pas la fluidité des lignes d’un cyclo-sport italien, mais ce cadre ouvert aux formes arrondies, flatte indéniablement le regard. Ajoutez à cela les nombreux chromes alliés à la teinte chaudron, et vous découvrez la « mob » grand luxe. Luxe, mais aussi originalité, comme en témoigne l’inimitable robinet à essence type « clavier à touches », aujourd’hui délicieusement « kitch ».


La volonté d’efficacité est aussi au rendez-vous : carter de chaîne étanche, garde-boue enveloppants, moyeu arrière à broche, repose-pieds suspendus pour le passager, freins et optique largement dimensionnés. La mécanique n’est pas en reste, avec le moteur Mobymatic à turbine couplé à la toute nouvelle boîte relais. « Ce dispositif caractérisé par l’adjonction d’une poulie arrière extensible permet une plage de variation jusqu’alors insoupçonnée » explique la publicité d’époque. Autre nouveauté, l’allumage transistorisé proposé également sur la Spéciale Route, l’autre modèle phare de la gamme.


Avec l’AV98 Sommet, Motobécane met les petits plats dans les grands, mais le luxe, ça se paie. La belle est vendue 1 284 Francs, soit trois fois le prix de l’AV32S, dernière héritière directe de l’AV3. Handicapée par ce prix, la Sommet se vend plutôt moyennement jusqu’en 1965.


Aujourd’hui, c’est l’un des modèles les plus rares, donc l’un des plus convoité par les amateurs !




HISTOIRE D’AMIS : Lorsqu’en 1998, l’ami Jean-Georges SIRGUEY me présente sa trouvaille, le doute m’envahit. Bien sûr, cet amas de rouille est né Sommet, mais vais-je pouvoir en tirer quelque chose ? Moteur et boîte irrécupérables, partie cycle en dentelle après trente ans de cave ! Après un examen minutieux de l’épave, une lueur d’espoir apparaît, la coque est « restaurable ». Etant donné l’ampleur de la tache, le projet est reporté à une date ultérieure, sauf que trois mois plus tard, l’ami Julien COSSO me demande de lui restaurer une Motobécane, une 98 Sommet serait la bienvenue !...


RENAISSANCE : La restauration d’une mobylette, de surcroît à l’état d’épave, nécessite à mon sens le respect des mêmes règles et le même niveau d’exigence que la restauration d’une moto de prestige. C’est dans cet esprit que cette mob a pu renaître. En priorité, réunir toutes les pièces manquantes. Quelques coups de fil bien ciblés, prélèvements sur stock personnel, bourses d’échanges et coup de chance (merci à Jean-Denis DUCRETET pour le robinet d’essence neuf). Montage à blanc pour éviter les surprises, préparations soignée de la tôlerie avant peinture, passage chez le chromeur, révision moteur, et enfin, le remontage qui se termine en janvier 2000. Julien peut alors prendre livraison de la belle, en livrée chaudron et chromes, et sillonner les routes de Seine & Marne !


TRANSFORMER AVANT ESSAI : Comme souvent dans le milieu de la collection, les machines changent de mains et c’est à la suite d’un échange en juin dernier que la Sommet revient en terre limousine. Après quelques sorties à son guidon, Julien avait décidé de monter un kit cylindre piston et un carburateur de 15. Aucun préjudice esthétique, tout est caché ! Les quelques centaines de kilomètres avalées depuis démontrent le bien fondé de l’initiative. Cyclo à vocation citadine, l’AV98 kitée devient un extraordinaire jouet, à l’aise sur tous les terrains de jeu. Démarrages vifs, aptitudes en cotes renforcées, et surtout, meilleure vitesse de pointe, font de cette machine une vraie « Grand Tourisme Sportive3 ; La partie cycle entièrement d’origine suit très bien l’augmentation des performances, le freinage est à la hauteur, la rigidité du cadre jamais prise en défaut. Si l’on excepte la désastreuse fourche à graisse, cette mobylette est très homogène dans son comportement, et incite à rouler en toute sécurité et sans mollir… Quant à sa cote d’amour, elle fait l’unanimité pour toutes les générations.


COMMENT LES RECONNAITRE: Les modèles construits en 1963 et 1964, sont équipés d’enjoliveurs de réservoir et de couvercles de boîte à outils de forme arrondie. Les pédales sont des Lyotard blanches. Les modèles 1965, également commercialisés en version vélomoteur, sous l’appellation D98 adoptent les mêmes accessoires, mais de forme anguleuse, avec des pédales noires de type monobloc.


Pour la petite histoire, le modèle présenté au Salon 1962, était équipé d’un garde-boue arrière à profil courbe, prélevé sur l’AV89. Quant aux jantes de 17, elles sont restées en profil rond pendant les trois années de production.





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